il était une fois HATTI

Il était une fois

(Journal l’Alsace du 6/02/1954)

Mais cela s’est passé presque hier, à Noël pour préciser. Et puisque les belles histoires sont toujours vraies, racontons donc celle-ci ; un conte de Noël À retardement, en quelque sorte, et qui a la merveilleuse qualité d’être parfaitement et absolument authentique…
Depuis 1920, un ancien légionnaire se terre dans un vieil abri de guerre bétonné, sur les pentes du Vieil-Armand, à un kilomètre de la commune de Wattwiller. Hatti — tel est le nom que la population des alentours lui a donné — vit dans cet antre depuis prés de 34 ans. Pourquoi y est- il venu ? Personne ne le saura. Car Hatti ne parle: guère, sinon avec les animaux de la forêt, dont il est devenu le muet ami et confident. Les habitants ne le craignent pas, et les enfants l’aiment bien. Cet homme, aujourd’hui âgé de 75 ans, cueille en été des fraises et des myrtilles, en automne des champignons ; il vend aussi des balais, pour se payer un peu de tabac, et, à des dates que lui seul connaît, une chopine de gros rouge. La forêt de Wattwiller, c’est « sa » forêt, et rien ne pourra jamais l’en éloigner, sinon la mort.
Pour cet être déjà rayé de la liste des vivants, depuis longtemps il n’y avait plus de Noël. En avait-il jamais eu ? Quel tragique souvenir en avait effacé le mot de sa mémoire ? Cela aussi, personne ne le saura jamais.
Mais voici que, il y a deux ans de cela, le Père Noël est venu le voir. Le Père Noël, c’étaient les enfants de l’école, et ils apportèrent des cadeaux, beaucoup de cadeaux. Et à la dernière Noël, ils sont revenus, sous la conduite de religieuses. Un ange, porteur d’un arbre de Noël, les précéda. Lorsque Hatti entendit leur chant au lointain, il sortit de sa tanière. « Est- ce déjà Noël ? », c’est tout ce qu’il sut dire devant ce miracle renouvelé. Une lueur enfantine dans les yeux, il écouta, en se signant plusieurs fois, les cantiques de Noël que les enfants lui chantèrent, il vit les
bougies s’allumer, il accepta d’une main tremblante les nombreux colis que les petites menottes lui tendirent. Et lorsque la miraculeuse procession, l’ange blanc en tête, eut disparu au tournant du chemin forestier, il resta là, le sapin allumé dans les mains, tête nue, et les pensées perdues dans ce monde mystérieux où nos jeunes années avaient puisé leurs rêves…
Une belle histoire, une vraie histoire, et qui, malgré la Noël déjà lointaine, reste toujours belle et vraie.

Tout décontenancé, le vieux solitaire ne sait plus vers qui se Les bougies allumées lui rappellent-elles de vieux souvenirs tourner devant cette inattendue vision de Noël.

Les bougies allumées lui rappellent-elles de vieux souvenirs. (Photos Schwobthaler)

Abri situé au bord du chemin des Pèlerins où logeait « HATTI ». (Mis en valeur par les Amis du Hartmannswillerkopf)

Voir également sur le site https://www.ahwk.fr/- rubrique Actualités – archives Chantier achevé le 5 mai 2010
Il se servait également d’un second abri plus près du village de Wattwiller, situé au terminus « gare Niederwald » de
la voie militaire de 60cm.
« HATTI » se nommait — WURTZ Emile, il est né le 10 mars 1878 à Etueffont (90), de WURTZ Jacques et de GEISBULHER Madeleine, il était un ancien « légionnaire », Il est décédé le 4 février 1957 à 19h45 à Wattwiller.
Nous ne sauront peut-être jamais quelles sont les raisons qui ont poussé « Hatti » à élire domicile dans cette forêt au pied du champ de bataille du « Hartmannswillerkopf.

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